Étude de la régulation de l'épissage alternatif

https://​www​.fli​ckr​.com/​p​h​o​t​o​s​/​w​h​e​a​t​f​i​e​l​d​s​/​2​0​7​4​1​1​5​8​3​8​/​i​n​/​p​h​o​t​o​s​t​r​e​am/

Je vais vous expo­ser dans cet articles un exemple de col­la­bo­ra­tion entre bio­lo­gistes et bio­in­for­ma­ti­ciens afin de répondre à un pro­blème bio­lo­gique com­plexe : l'étude de la régu­la­tion de l'épissage alter­na­tif. Je vais vous pré­sen­ter dans un pre­mier temps le contexte bio­lo­gique, à savoir ce qu'est l'épissage et com­ment il est régu­lé. Puis je vais vous décrire les méthodes de bio­lo­gie molé­cu­laires per­met­tant de détec­ter d'une part les évé­ne­ments épis­sages alter­na­tifs (puces à exons, RNA­seq), et d'autre part les liai­sons protéines/​ARN (iCLIP). Enfin, je vous pré­sen­te­rai les méthodes d'intégration de ces don­nées pour répondre à la ques­tion : com­ment une pro­téine influence le choix des exons à épis­ser.

(Atten­tion, article très long!)

1- Introduction

1.1- L'épissage

Figure 1 : Syn­thèse et matu­ra­tion de l'ARN mes­sa­ger chez les euca­ryotes

L'épissage alter­na­tif est un pro­ces­sus bio­lo­gique décou­vert à la fin des années 1970 et consti­tue l'un des méca­nismes les plus com­plexes chez les euca­ryotes. L'ARN (acide ribo­nu­cléique), molé­cule ser­vant d'intermédiaire entre les gènes et les pro­téines, est syn­thé­ti­sé dans le noyau des cel­lules et subit plu­sieurs trans­for­ma­tions avant d'être tra­duit en pro­téines.

L'une de ces trans­for­ma­tions, nom­mée épis­sage, est la plus com­plexe et est en grande par­tie res­pon­sable de la diver­si­té du pro­téome (ensemble des pro­téines expri­mées dans une cel­lule). L'ARN des euca­ryotes n'est en effet pas com­po­sé d'une chaîne conti­nue d'informations comme chez les bac­té­ries. Un ARN euca­ryote se décom­pose en régions codantes, les exons, entre­cou­pées de régions non-codantes, les introns. L'épissage est le pro­ces­sus durant lequel les introns sont enle­vés de l'ARN pour ne gar­der que l'information néces­saire à la pro­duc­tion de pro­téines fonc­tion­nelles.

Figure 2 : Méca­nisme de l'épissage de l'ARNm

Sur ce sché­ma (Figure 2), nous pou­vons voir le prin­cipe même de l'épissage. Le "A" (Adé­nine), côté 3' de l'intron en vio­let opère une attaque nucléo­phile sur sa par­tie 5', qui va se déta­cher. La seconde extré­mi­té est à son tour libé­rée et les deux exons ici en bleu sont rac­cor­dés.

Figure 3 : Assem­blage du spli­ceo­some

Cette réac­tion est cata­ly­sée par un des plus gros com­plexes pro­téique des cel­lules euca­ryotes : le spli­ceo­some. La figure 3 repré­sente l'assemblage de ce com­plexe qui se déroule en 4 phases. Tout d'abord nous avons la fixa­tion du snRNP U1 et du spli­cing fac­tor SF1, puis le recru­te­ment de U2AF qui va définir où l'ARN va être cou­pé. Ensuite vient U2 et enfin le tri-snRNP. Le com­plexe va ensuite chan­ger de confor­ma­tion et opé­rer l'épissage comme vu pré­cé­dem­ment.

1.2- L'épissage Alternatif

L'épissage ne se pro­duit pas tou­jours de la même manière. Les exons peuvent être enle­vés de l'ARN, ou bien un intron peut être gar­dé. On appelle ce phé­no­mène l'épissage alter­na­tif. Ce tableau décrit les formes les plus clas­siques d'épissages alter­na­tifs (Tableau 1).

Tableau 1 : Clas­si­fi­ca­tion tra­di­tion­nelle des formes d'épissage alter­na­tif

Ici nous avons 5 formes dif­fé­rentes d'épissages : exon cas­sette, exons mutuel­le­ment exclu­sif (soit l'un, soit l'autre est choi­si mais jamais les deux ou aucun), extré­mi­tée 5' ou 3' alter­na­tive et enfin, la réten­tion d'introns. Même si ces formes décrivent les cas les plus répan­dus de l'épissage, elles ne reflètent pas la com­plexi­té du méca­nisme. Les exons ne sont pas choi­si par hasard. L'épissage est régu­lé par des pro­téines de liai­son à l'ARN (répres­seurs et acti­va­teurs), qui se lient sur des séquences cis-régu­la­trices ("silen­cer" et "enhan­cer"). La struc­ture secon­daire de l'ARN peut elle aus­si influer sur l'épissage.

Les élé­ments cis-régu­la­teurs sont par conven­tion clas­sés en fonc­tion de leur place par rap­port à l'exon et en fonc­tion de leur capa­ci­té à faci­li­ter ou à empê­cher l'épissage. Les ESE pour Exo­nic Spli­cing Enhan­cer et les ESS pour Exo­nic Spli­cing Silen­cer affectent l'épissage de l'exon dans lequel ils se trouvent, alors que les ISE (Intro­nic Spli­cing Enhan­cer) et les ISS (Intro­nic Spli­cing Silen­cer) influent sur les exons adja­cents depuis leur posi­tion intro­nique (Figure 4).

Figure 4 : Élé­ments cis-régu­la­teurs de l'épissage

Les élé­ments cis-régu­la­teurs sont les cibles des pro­téines de lai­son à l'ARN qui par­ti­cipent au choix des exons à épis­ser en facil­tant le recru­te­ment du spli­ceo­some ou bien en ren­trant en com­pé­ti­tion avec ce com­plexe.

Figure 5 : Pro­téines auxil­liaires de l'épissage

La figure 5 résume les prin­ci­pales pro­téines de liai­son qui régulent l'épissage et leurs élé­ments cis-régu­la­teurs cor­res­pon­dants.

2- Approche Experimentale

L'étude de l'épissage alter­na­tive à l'échelle d'un génome est un des chal­lenges actuel que ren­contre la bio­lo­gie molé­cu­laire. Avec l'avènement des tech­niques de hautes réso­lu­tions il devient de plus en plus facile d'étudier les évè­ne­ments d'épissage. Dans un pre­mier temps je vous pré­sen­te­rai com­ment les évé­ne­ments d'épissage sont détec­tés (puce à exons et RNA­seq) puis com­ment iden­ti­fier les inté­rac­tions protéines/​ARN avec la méthode iCLIP (indi­vi­dual-nucleo­tide reso­lu­tion UV cross-lin­king and immu­no­pre­ci­pi­ta­tion).

2.1- Puces à exons

Avant le déve­lop­pe­ment des puces à exons (splice-junc­tion microar­rays), l'épissage alter­na­tif était étu­dié au cas par cas. Depuis quelques années, de plus en plus d'études ont tra­vaillé sur les pro­prié­tés glo­bales de l'épissage alter­na­tif en uti­li­sant les puces (microar­rays) four­nis­sant des infor­ma­tions sur les iso­formes d'ARN mes­sa­gers. Je vais décrire briè­ve­ment com­ment détec­ter les dif­fé­rences d'épissage avec les puces à exons.

Figure 6 : Pro­to­cole de pré­pa­ra­tion de puce à ADN (Affi­me­trix©)

Le prin­cipe des puces à ARN Affi­me­trix© est décrit figure 6. L'ARNm est extrait des cel­lules, puis subit une trans­crip­tion inverse. À l'issue de cette pre­mière trans­for­ma­tion nous obte­nons de l'ADNc (ADN com­plé­men­taire). Cet ADNc est trans­crit pour recons­ti­tuer le brin d'ARNm ori­gi­nel et y inclure des nucléo­tides mar­qués avec de la bio­tine. Cet ARNc mar­qué est ensuite frag­men­té et hybri­dé sur la puce. La puce contient des sondes qui sont des séquences spé­ci­fiques com­plé­men­taires de l'ARNc. Après l'hybridation, la puce est lavée pour enle­ver les ARNc qui ne sont pas liés spé­ci­fi­que­ment aux sondes. Un anti­corps anti-bio­tine cou­plé à un fluo­ro­phore est uti­li­sé pour révé­lé l'hybridation. Le signal fluo­res­cent est détec­té et ana­ly­sé, en par­tant du prin­cipe que l'intensité du signal est pro­por­tion­nel au nombre d'ARNc hybri­dés.

Figure 7 : Sondes uti­li­sées pour détec­ter l'épissage d'un exon cas­sette (exon vio­let)

Dans les cas des puces à exons, le but n'est pas de détec­ter l'expression géné­tique mais les dif­fé­rentes formes d'épissage pré­sents dans les cel­lules. La puce contient des sondes cou­vrant toutes les formes d'épissages alter­na­tifs connus pour les ARN.

La figure 7 montre les sondes uti­li­sées pour détec­ter les évé­ne­ments d'épissage d'un exon cas­sette. Les sondes cou­vrant l'intérieur des exons (en rouge) sont uti­li­sées comme réfé­rences pour détec­ter l'inclusion de cha­cun des trois exons alors que les sondes recou­vant les jonc­tions exon-exon (en vert et en jaune) per­mettent de détec­ter quel iso­forme est pré­sent.

La figure 8 est un exemple de signaux que l'on peut obte­nir dans le cas d'un exon cas­sette. Les barres bleues repré­sentent le signal mesu­ré quand l'exon cas­sette est inclu dans l'ARN mature (iso­forme 1), et les barres grises repré­sentent le cas où l'exon est exclu (iso­forme 2).

Figure 8 : Exemple de signaux détec­tés pour 2 iso­formes avec un exon cas­sette

2.2- RNAseq

Le séquen­çage de l'ARN (RNA­seq) est une tech­nique récem­ment déve­lop­pée qui uti­lise les tech­no­lo­gies nou­velles géné­ra­tion du séquen­çage de l'ADN pour étu­dier le trans­crip­tome. L'ARN mes­sa­ger est extrait des cel­lules et conver­ti en ADNc par trans­cri­tion inverse en uti­li­sant comme amorce une séquence poly(T) qui va se lier à la queue poly(A) de l'ARN. l'ADNc est ensuite frag­men­té en séquences courtes (reads) qui sont ensuite séquen­cés. Une fois séquen­cés, la séquence ori­gi­nelle des ARN est retrou­vée en "map­pant" les reads sur le génome de réfé­rence. Les reads recou­vrant l'intérieur des exons sont les plus facile à repla­cer sur le génome et sont donc "map­pés" en pre­mier. Ensuite, dif­fé­rentes méthodes peuvent être uti­li­sées pour  iden­ti­fier les reads qui che­vauchent des jonc­tions exon-exon connues ou non connues (par exemple, une par­tie d'un intron excep­tion­nel­le­ment inclu comme un exon). Je vous ren­voie à l'article de adem­can pour plus de détail. La figure 9 décrit le "map­ping" de reads de deux iso­formes sur un génome de réfé­rence.

Figure 9 : Méthode de détec­tion d'isoformes par map­ping de reads RNA­seq

 

Une fois que les dif­fé­rences d'épissages ont été décou­vertes, il faut main­te­nant iden­ti­fier les fac­teurs qui sont res­pon­sables de ces dif­fé­rences. La stra­té­gie est de se foca­li­ser sur une pro­téine de liai­son à l'ARN et d'étudier la loca­li­sa­tion des inter­ac­tions de cette pro­téine avec l'ARN afin de voir si celle-ci entre en com­pé­ti­tion avec le spli­ceo­some.

2.3- iCLIP (Individual-nucleotide Resolution UV Cross-linking and Immunoprecipitation)

iCLIP est une méthode de bio­lo­gie molé­cu­laire qui per­met de détec­ter les inté­rac­tions protéine/​ARN in vivo et de déter­mi­ner la séquence exacte recon­nue par la pro­téine. Les cel­lules en culture sont irra­diées avec des ultra-vio­lets (UV), ce qui entraîne la for­ma­tion de liai­sons cova­lentes entre les pro­téines et l'ARN. Cette méthode uti­lise la pho­to­réac­ti­vi­té, une pro­prié­té natu­relle qui s'applique aux nucléo­tides, par­ti­cu­liè­re­ment aux pyri­mi­dines (Thy­mine, Ura­cile, Cyto­sine), et à cer­tains acides ami­nés ( Cys, Lys, Phe, Trp et Ty). Une irra­dia­tion à 254nm (ondes UV) per­met de figer les inté­rac­tions entre les pro­téines et les acides nucléiques ce qui implique que seules les inté­rac­tions directes avec l'ARN sont détec­tées par iCLIP.

Figure 10 : Pro­to­cole iCLIP (König 2010)

Après l'irradiation, les com­plexes ARN/​Protéines liés sont immu­no­pré­ci­pi­tés en uti­li­sant un anti­corps spé­ci­fique de la pro­téine d'intérêt, puis un adap­ta­teur (oli­go­nu­cléo­tide) est rajou­té à l'ARN pré­ci­pi­té. La pro­téine de liai­son est ensuite dégra­dée par la pro­téi­nase K qui va lais­ser un poly­pep­tide là où la pro­téine est liée à l'ARN. L'ARN ain­si libé­ré de la pro­téine est conver­ti en ADNc en uti­li­sant une amorce qui contient deux régions cli­vables et un code barre aléa­toire (séquence de 3 nucléo­tides choi­sis par hasard). Le poly­pep­tide pré­sent sur l'ARN va cau­ser l'arrêt pré­ma­tu­ré de la trans­crip­tion inverse à l'endoit de la liai­son protéine/​ARN, ce qui fait que le der­nier nucléo­tide ajou­té lors de la trans­crip­tion inverse cor­res­pond au nucléo­tide qui pré­cède direc­te­ment la liai­son protéine/​ARN. L'ADNc est ensuite cir­cu­la­ri­sé et linéa­ri­sé en cli­vant l'adaptateur avec une enzyme de res­tric­tion spé­ci­fique. L'ADNc est ampli­fié par PCR puis est séquen­cé par un séquen­ceur nou­velle géné­ra­tion. Les reads sont map­pés sur le génome de réfé­rence de l'organisme étu­dié après avoir enle­vé les séquences adap­ta­trices (Figure 10).

Les reads pré­sen­tant le même code barre et la même posi­tion sur le génome sont enle­vés des résul­tats pour se pré­ser­ver des arte­facts de PCR. Nous obte­nons donc le nombre d'événement de liai­son sur un nucléo­tide en comp­tant les ADNc qui pré­sentent un code barre dif­fé­rent et une posi­tion iden­tique (Figure 11).

Figure 11 : Prin­cipe du comp­tage des ADNc pour les nucléo­tides liés aux pro­téines

3- Approche Bioinformatique

Après avoir réa­li­sé d'une part la recherche des épis­sages alter­na­tifs, et d'autre part la posi­tion des liai­sons protéine/​ARN, il nous faut main­te­nant recou­per ces infor­ma­tions. C'est là qu'entrent en jeux les bio­in­for­ma­ti­ciens.

3.1- Genome Browser

La pre­mière façon de confron­ter ces résul­tats (et la plus facile) est de visua­li­ser le tout dans un genome brow­ser. La figure 12 est une copie d'écran d'un genome brow­ser où sont char­gées les don­nées de RNA­seq et les don­nées de iCLIP. Du bas vers le haut nous avons les coor­don­nées géno­mique, l'annotation des gènes (ici CD55, le rec­tangle bleu repré­sente un exon, la ligne un intron), puis en bleu nous avons les don­nées de RNA­seq pour des cel­lules controles, en rouge une RNA­seq sur des cel­lules où l'on a enle­vé la pro­téine de liai­son hnRNP C, et en vert les don­nées iCLIP pour la pro­téine de liai­son hnRNP C.

Figure 12 : Exon cas­sette régu­lé par la pro­téine hnRNP C

Nous voyons bien que l'exon cas­sette sur lequel on se foca­lise est for­te­ment inclu dans l'ARN lorsque les cel­lules n'expriment pas la pro­téines hnRNP C. En paral­lèle, nous consta­tons un pic de liai­son de hnRNP C juste en amont de cet exon en condi­tion nor­male. Nous pou­vons donc sup­po­ser qu'il y a une rela­tion entre l'exclusion de l'exon et la liai­son de la pro­téine en amont de l'exon.

Il est évident que pour étu­dier un gène pré­cis cette méthode est adap­tée, mais pour une approche à large échelle, nous n'allons pas étu­dier les exons un par un ! Pour étu­dier les effets glo­baux de la pro­téine de la liai­son sur l'épissage, nous allons réa­li­ser des RNA spli­cing maps, ou cartes d'épissage.

3.2- RNA splicing map

Les RNA spli­cing maps sont des repré­sen­ta­tions gra­phiques per­met­tant de visua­li­ser l'effet glo­bal d'une pro­téine sur l'épissage. Le prin­cipe est simple. Nous sépa­rons les donées d'épissage en trois groupes :

  • les exons down-régu­lés (silen­ced) par la pro­téine (exons qui montrent une hausse signi­fi­ca­tive de fré­quence d'inclusion quand la pro­téine n'est pas expri­mée)
  • les exons controls (exons qui ne montrent aucune dif­fé­rence d'inclusions avec ou sans la pro­téine)
  • les exons up-régu­lés (enhan­ced) par la pro­téine (exons qui montrent une baisse signi­fi­ca­tive de fré­quence d'inclusion quand la pro­téine n'est pas expri­mée)

Pour chaque exon de chaque groupe, on défi­nit quatre fenêtres d'étude (figure 13):

  • la fin de l'exon pré­cé­dant l'exon d'intérêt
  • le début de l'exon d'intéret
  • la fin de l'exon d'intérêt
  • le début de l'exon sui­vant l'exon d'intérêt
Figure 13 : Fenêtre d'études pour les RNA maps

Dans ces fenêtres, on va regar­der s'il y a des évé­ne­ments de liai­son pour chaque nucléo­tide grâce aux don­nées de iCLIP. Une fois tous ces évé­ne­ments recen­sés, on va som­mer le nombre de liai­sons pour chaque nucléo­tide de tous nos exons et divi­ser ces nombres par le nombre total d'exons. On obtient donc le nombre moyen de liai­sons de la pro­téine à chaque nucléo­tide. On va enfin repré­sen­ter tous ces résul­tats sur un même graphe pour com­pa­rer les évé­ne­ments de liai­sons pour les exons up-régu­lés, down-régu­lés et controls, où l'axe des abcisses repré­sente nos fenêtres d'études rela­tives aux coor­don­nées des exons, et l'axe des ordon­nées repré­sente le nombre moyen de liai­sons par base (Figure 14).

Figure 14 : Prin­cipe des RNA maps

Et voi­ci ce que donne la RNA spli­cing map pour la pro­téine hnRNP C sur des don­nées de puce à exon :

Figure 15 : RNA spli­cing map de hnRNP C

Cette carte a été réa­li­sée avec un script écrit en R avec la librai­rie Lat­tice que je vous recom­mande si vous vou­lez faire de beaux gra­phiques en R. Un jour si j'ai le cou­rage, je publie­rai mon script chez Bio­con­duc­tor. On y voit que les exons down-regu­lés (en bleu) pré­sentent un nombre remar­quable de hnRNP C juste avant le début de l'exon, alors que chez les exons controls (gris) et les exons up-régu­lés (en rouge) ne pré­sentent pas de région par­ti­cu­liè­re­ment ciblée par hnRNP C. On a donc, grâce à ces cartes, mis en évi­dence un effet glo­bal de la pro­téine hnRNP C sur l'épissage alter­na­tif.

3.3- Heatmap

Une autre manière d'étudier l'épissage alter­na­tif régu­lé par des pro­téines est de s'intéresser aux com­pé­ti­tions entre pro­téines pour un même site de fixa­tion. Pour celà il suf­fit de réa­li­ser trois expé­riences iCLIP :

  • pro­téine 1 en condi­tion nor­male
  • pro­téine 2 en condi­tion nor­male
  • pro­téine 2 en condi­tion de non-expres­sion de la pro­téine 1 (knock-down)

On met ensuite ces résul­tats en rela­tion avec les don­nées d'épissages rec­cueillies par RNA­seq ou par puce à ARN, on sélec­tionne des exons pré­sen­tant des dif­fé­rences d'épissage signi­fi­ca­tives et on peut soit faire une RNA spli­cing map en super­po­sant les courbes, soit réa­li­ser une heat­map comme celle-ci :

Figure 16 : Heat­map repré­sen­tant une com­pé­ti­tion entre deux pro­téines de liai­son

La heat­map per­met de visua­li­ser les liai­sons des pro­téines en amont des exons (ici 50 nucléo­tides en amont) pour les 2 pro­téines et dans deux condi­tions. Chaque ligne repré­sente un exon, et l'intensité du bleu repré­sente le nombre de liai­sons. On voit ici que la pro­téine 2 se lie beau­coup plus en amont des exons quand la pro­téine 1 est absente des cel­lules. On est en pré­sence d'une com­pé­ti­tion entre les deux pro­téines.

4- Conclusion

Je pense avoir illus­tré à tra­vers cet article com­ment les bio­lo­gistes et les bio­in­for­ma­ti­ciens peuvent tra­vailler de consort pour répondre à un pro­blème bio­lo­gique com­plexe tel que l'étude de l'épissage alter­na­tif. Les pro­grès des expé­riences de bio­lo­gie molé­cu­laires gagnent non seule­ment en com­plexi­té mais aus­si et sur­tout en qua­li­té. Nous sommes désor­mais en mesure d'étudier des phé­no­mènes aus­si com­plexes que l'épissage et à une réso­lu­tion extê­me­ment pré­cise.

Références

Alberts, B. et al. Mole­cu­lar Bio­lo­gy of the Cell in Cell 5th, vol. 54 (Gar­land Science, Tay­lor & Fran­cis Group, USA, 2008), 5 edn.

König, J. et al. iCLIP reveals the func­tion of hnRNP par­ticles in spli­cing at indi­vi­dual nucleo­tide reso­lu­tion. Nature Struc­tu­ral & Mole­cu­lar Bio­lo­gy 17, 909–916 (2010).

Nil­sen, T. W. The spli­ceo­some : the most com­plex macro­mo­le­cu­lar machine in the cell ? BioEs­says : news and reviews in mole­cu­lar, cel­lu­lar and deve­lop­men­tal bio­lo­gy 25, 1147–9 (2003).

Chen, M. & Man­ley, J. L. Mecha­nisms of alter­na­tive spli­cing regu­la­tion : insights from mole­cu­lar and geno­mics approaches. Nature reviews. Mole­cu­lar cell bio­lo­gy 10, 741–54 (2009).

Black, D. L. Mecha­nisms of alter­na­tive pre-mes­sen­ger RNA spli­cing. Annual review of bio­che­mis­try 72, 291–336 (2003).

Ule, J. et al. An RNA map pre­dic­ting Nova-dependent spli­cing regu­la­tion. Nature 444, 580–6 (2006).

Barash, Y. et al. Deci­phe­ring the spli­cing code Nature 465,53–59 (2010).

Figures :

Figure 1 : BorisTM (Public Domain) http://​en​.wiki​pe​dia​.org/​w​i​k​i​/​F​i​l​e​:​N​u​c​l​e​o​t​i​d​e​s​_​1​.​svg
Figure 2, 4, 5, 7, 8, 9, 11, 13, 14  & Tableau 1 : Isa­belle Sté­vant (Art Libre) (adap­tées de divers articles)
Figure 3 : Repro­duc­tion d'une figure du livre Mole­cu­lar Bio­lo­gy of the Cell
Figure 6 : http://​www​.affy​me​trix​.com
Figure 10 : tirée de König et al.
Figure 12, 15, 16 : Isa­belle Sté­vant (Tous droits réser­vés)



Pour continuer la lecture :


Commentaires

7 réponses à “Étude de la régulation de l'épissage alternatif”

  1. Avatar de Yoann M.
    Yoann M.

    J'ai ado­ré ! Mer­ci pour toutes ces expli­ca­tions qui je pense devraient aider pas mal de monde !

  2. Avatar de Yohann

    Excellent article qui rafraî­chit bien la mémoire.

    Mer­ci !

    J'aurai une ques­tion concer­nant Lat­tice.
    Je suis uti­li­sa­teur de ggplot2 et j'aimerai savoir si cela vaut le coup de se mettre a Lat­tice et si, fina­le­ment ces deux packages per­mettent d'aboutir a des résul­tats simi­laires.

    1. Je n'ai jamais uti­li­sé ggplot2, mais d'après ce que je vois ça a l'air de faire à peu près la même chose.
      Je pense que le mieux est d'essayer lat­tice pour se faire une idée. Peut-être que l'un est plus pra­tique dans cer­tains cas, et l'autres plus adap­té à d'autres cas, je ne sais pas.

      1. Avatar de BIoinfoINSERM
        BIoinfoINSERM

        Bon­jour, Très bon article Mer­ci
        Je me demande s' il existe des outils bio­in­for­ma­tique pour la recherche des cas­settes exon (ou alter­na­tive spli­cing) depuis des fichiers (gene­bank eg.)
        Mer­ci pour votre réponse

        1. Bon­jour,

          Il existe des ten­ta­tives de bases de don­nées réper­to­riant les évè­ne­ments de spli­cing mais il faut voir si c'est à jour. En voi­ci un par exemple :
          http://​hexevent​.mmg​.uci​.edu/​c​g​i​-​b​i​n​/​H​E​X​E​v​e​n​t​/​H​E​X​E​v​e​n​t​W​E​B​.​cgi

          Ensuite, en fouillant dans les option de Bio­Mart, je pense qu'il est pos­sible de trou­ver ce genre d'info vu que le site Ensem­bl est capable de four­nir les infos sur les dif­fé­rents trans­crits de gènes.

          Dans cette étude, les exons alter­na­tifs ont été défi­nis via les RNA­seq et non via des anno­ta­tions dans des bases de don­nées.

  3. […] Étude de la régu­la­tion de l’épissage alter­na­tif […]

  4. […] Étude de la régu­la­tion de l’épissage alter­na­tif […]

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