Suite de notre rubrique Questions à… sur Bioinfo-Fr.net. Après avoir questionné de nombreux chercheurs, il est maintenant temps de prendre du recul lors d'un entretien avec Bertrand Braunschweig directeur du centre Inria de Rennes-Bretagne Atlantique, centre qui abrite notamment deux équipes de recherche en bioinformatique et une plate-forme dédiée à la bioinformatique.
Sylvain Prigent (S.P.) : Bertrand Braunschweig bonjour, et merci d'avoir accepté de répondre à quelques questions pour le blog bioinfo-fr.net. Est-ce que vous pourriez commencer par vous présenter rapidement pour nos lecteurs s'il vous plait ?
Bertrand Braunschweig (B.L.B.) : Je dirige le centre Inria (Institut national de recherche en informatique et en automatique) de Rennes-Bretagne Atlantique depuis fin 2011, auparavant j'ai eu une carrière de chercheur dans l'industrie pétrolière pour commencer puis à l'IFP (l'Institut Français du Pétrole qui s'appelle maintenant IFP Energies nouvelles) où je suis resté pendant pas mal d'années pour animer une équipe de recherche en intelligence artificielle. J'y ai aussi travaillé sur des sujets d'interopérabilité logicielle dans le domaine des procédés de raffinage, chimiques et pétrochimiques. Après un petit passage dans l'organisation des projets de l'IFP j'ai passé 5 ans à l'ANR (Agence Nationale de la Recherche) où j'ai été responsable de quelques programmes dans le département Sciences et Technologies de l'Information et de la Télécommunication avant d'avoir pendant 3 ans la responsabilité de ce département qui portait les STIC et les nano-technologies. Dans ce département j'avais notamment dans mes responsabilités les programmes de bioinformatique. C'est pendant cette période ANR que j'ai connu de nombreux chercheurs en bioinfo. Et je suis donc arrivé ici en octobre 2011.
SP : Vous êtes donc actuellement directeur du centre Inria Rennes Bretagne Atlantique. Au jour le jour, à quoi correspond ce travail ?
BLB : Il y a quatre facettes qui incombent au directeur d'un centre Inria. Chacune prenant en théorie 25% du temps. Il y a évidemment la vie scientifique du centre avec tout ce qui est création, suivi des équipes, orientation stratégique, la recherche, le transfert, le développement technologique. Et je suis évidemment aidé pour cela par mon adjoint, le délégué scientifique du centre. Il y a également l'administration du centre (avec ma déléguée à l'administration). Puis, tout ce qui est la représentation du centre vis-à-vis de notre environnement, de notre écosystème de recherche et d’innovation, comme on dit : les collectivités territoriales (régions, métropoles, etc.), les partenaires, les universités, les grandes écoles, etc. Ça demande beaucoup de temps surtout en ce moment où il y a beaucoup de changements dans notre environnement de recherche et d'innovation, c'est un travail très important et très prenant. Et puis je prends ma part de la direction d’Inria, je suis membre du comité de direction d'Inria. C'est également un gros quart de mon temps de discuter avec mes collègues directeurs des autres centres de recherche et avec les directions fonctionnelles et la direction générale.
Et puis il y a tout le reste, tout ce que je n'ai pas décrit. Les surprises, comme par exemple l'an dernier le choix d'une œuvre d'art dans le cadre du 1% artistique. C'était un travail passionnant.
SP : Pourriez-vous nous décrire un petit peu plus la bioinformatique au centre Inria Rennes ?
BLB : Actuellement il y a deux équipes-projets. L'histoire c'est qu'il y avait une grande équipe (Symbiose) qui a été découpée en deux parce qu'il y avait deux grands domaines de recherches dans cette équipe. Cette équipe d'une quarantaine ou une cinquantaine de personnes travaillait beaucoup avec la plate-forme GenOuest. Aujourd'hui il y a deux équipes complémentaires qui sont toutes deux utilisatrices de cette plate-forme. On a Genscale, dirigée par Dominique Lavenier qui est plutôt sur l'algorithmique pour la bioinfo, l'optimisation des algorithmes, le parallélisme, le traitement de masse, etc. Ils travaillent par exemple sur les données TARA, sur les acquisitions de métagénomique dans les océans.
La seconde équipe est plutôt "interprétation des connaissances autour des données de bioinfo". Il s'agit de Dyliss, dirigée par Anne Siegel. Ce sont plutôt des méthodes issues de l'IA de manière très très large avec des reconnaissances de séquences, des méthodes qui se rapprochent un peu du traitement de la langue. Ils sont très en contact avec les biologistes parce que dès que l'on commence à faire de l'interprétation c'est intéressant d'avoir le retour des gens de terrain.
Et il y a donc également la plate-forme GenOuest qui est très importante et qui sert les deux équipes mais qui sert aussi toute la communauté de bioinfo du grand ouest avec des infrastructures de stockage, de traitement de données, des logiciels mis à disposition, etc.
SP : Que pensez-vous de l'évolution de la bioinformatique pour ces prochaines années à Rennes ?
BLB : On a des équipes qui sont sur des domaines pas trop éloignées de la bioinfo, je pense à SERPICO par exemple qui fait de l'imagerie cellulaire à haute résolution et VisAGeS, l'équipe de neurosciences. Ce sont deux autres équipes qui sont dans le domaine très large de la biologie et de la santé. On a donc les deux équipes de bioinfo qui sont très "au fond" du vivant et ces deux autres équipes qui sont plutôt dans ses manifestations (imagerie cellulaire, neuronale, etc). Dans le passé il y avait peu d'interactions entre les différents niveaux d'analyse du vivant, un gros challenge serait d'avoir le lien entre les méthodes et données de bioinformatique et le reste qui est à un tout autre niveau de résolution. C'est quelque chose que l'on a inscrit dans les priorités du centre dans le cadre du plan stratégique Inria actuel. J'aimerais bien que l'évolution, ce soit des contacts et des avancées scientifiques entre ces équipes.
Par ailleurs je soutiens également fortement l'insertion de nos deux équipes dans le GIS Biogenouest (qui regroupe une trentaine de plate-formes de biologie dans le grand ouest) pour lequel il y a un projet fédérateur qui s'appelle e‑biogenouest. Ça permet de fournir une plate-forme qui permet aux gens d'accéder d'une manière aisée à différents outils et qui permet aux chercheurs de conserver tous leurs résultats, les sources de leurs calculs, etc. On va évidemment soutenir cette action dirigée par Olivier Collin qui est responsable technique de la plate-forme GenOuest.
SP : Et bien merci beaucoup pour vos réponses. J'espère que désormais nos lecteurs en sauront un peu plus sur la direction d'un centre Inria et sur tout ce qui touche à la bioinformatique dans ce centre.
Merci à NiGoPoL, Hautbit et Clem pour la relecture pré-publication de cet article
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