Ça y est, les JOBIM 2013 ont eu lieu. Cela se passait à Toulouse au Centre des Congrès Pierre Baudis. Ce fut une semaine bien chargée et bioinformatiquement très intéressante. Les sessions plénières ainsi que les parallèles ont rencontré un certain succès. Cette année les conférenciers invités étaient au nombre de six : Simon Anders (EMBL, Heildelberg), Christine Brun (TAGC, Marseille), Laurent Duret (LBBE, Lyon), Jean-Loup Faulon (Université d'Evry), Roderic Guigo (CRG, Barcelone) et Pedro Mendes (Université de Manchester). Nous noterons dès à présent l'effort d'une petite majorité des orateurs à présenter en anglais. Cela pourrait paraître logique au vu de la présence d'invités étrangers, mais ce ne fut malheureusement pourtant pas automatique. Les vieilles habitudes françaises à ce qu'il paraît… Enfin pour ceux qui seraient attachés à ce genre de détails, le pack de bienvenue de cette année était composé d'un sac en bandoulière (beaucoup moins résistant que celui de l'année dernière au passage), d'un verre JOBIM2013, d'une clé USB 2Go comprenant les actes de la conférence, d'un carnet de note et d'un stylo bille.
Jour 1
C'est Simon Anders de l'EMBL qui a ouvert le bal pour la première session "Analyse de séquences et NGS". Il a d'abord fait un tour d'horizon des concepts fondamentaux établis dans l'analyse quantitative des données issues de RNA-seq, puis nous a parlé de son très connu DESeq et de son petit dernier DESeq2. À découvrir pour ceux qui affectionnent R et ses packages. Vint le tour de Nicolas Philippe du LIRMM qui nous a présenté CRAC, un logiciel d'analyse de reads issus de RNA-seq à essayer de toute urgence. On a ensuite enchainé avec la présentation de KisSplice un outil implémenté en python et C++ combinant des assembleurs de transcriptomes locaux et globaux, il semble s'avérer très utile dès lors qu'il nous manque un génome de référence. L'après midi étant alors bien entamé ce fut au tour de nos amis JeBiF de se présenter, puis nous leur emboitions le pas avec Guillaume dans le rôle de notre orateur de cette année (la vidéo se trouve juste en dessous, on s'excuse pour le son qu'il faudra sans doute mettre au maximum et de la part du grille-pain qui a été utilisé dans le rôle de la caméra…). Enfin, la formation bioinformatique d'Aurillac fut présentée pour conclure avant la pause.
À la reprise c'est Gregory Farrant, entre autre contributeur Roscovite de chez nous, qui a présenté dans son pipeline développé et validé pour estimer la diversité, la distribution et l’abondance relative des clades de picocyanobactéries marines Synechococcus et Prochlorococcus. La stratégie étant de recruter des lectures de métagénome sur un ensemble de génomes ou de gènes marqueurs. Ce pipeline fonctionne particulièrement bien pour l'étude des cyanobactéries marines car celles-ci sont abondantes dans le milieu marin (et par extension dans la fraction bactérienne des métagénomes marins), parce qu'elles présentent une importante diversité génétique et enfin parce que de nombreux génomes (56) ont été séquencés. Cependant une approche similaire pourrait être adaptée à d'autres organismes moins abondants et pour lesquels des génomes représentatifs d'une certaine diversité ou une base de données de séquence d'un gène marqueur (plus taxonomiquement résolutif que l'ADNr) seraient disponibles.
L'avant-dernière orateur n'était autre que Sophie Schbath (présidente entre autres de la SFBI) qui nous a parlé du travail de son équipe autour d'une nouvelle approche statistique permettant d'évaluer si des Matrices de Poids-Position (PWM) sont significativement enrichies dans certains jeux de séquences. Vous l'aurez compris, les équations étaient de sortie 🙂
Pour conclure cette première journée, c'est Rasha E. Boulos qui a introduit son travail autour de l'utilisation de la théorie des graphes dans le but d'analyser l'interaction des chromatines (Hi‑C) grâce aux données issues du génome humain.
Jour 2
La deuxième journée a commencé avec la présentation de Roderic Guigo qui nous a proposé un panorama des phénomènes de transcription au sein des cellules humaines. Ensuite, Cedric Chauve, de la Simon Fraser University au Canada nous a présenté son travail sur le génome de la bactérie responsable de la Peste Noire médiévale. Le génome de cette bactérie a été extrait de la pulpe dentaire de cadavres exhumés à Londres et séquencé. L’assemblage a été facilité par la disponibilité des génomes contemporains de Yersinia pestis ; ces derniers ont servi de référence pour la reconstruction du génome ancestral. L'utilisation de méthodes de paléogénomique ont permis la correction de l'alignement de contigs et montré que la bactérie Yersinia Pestis responsable de l’épidémie de Peste Noire contient beaucoup d’éléments mobiles assurant une grande plasticité génomique.
La fin de la matinée s'est ensuite divisées en trois sessions parallèles :
- La biologie structurale
- Les environnements de recherche en biologie
- La génomique d'association et les analyses de variants
Nous avons suivi la session environnements de recherche où nous avons assisté à une présentation de Julien Wollbrett, du LIRMM et du CIRAD, qui nous a présenté l'utilisation détournée d'un outil de mapping (R2DQ) entre ontologies et schémas de bases de données relationnelles. La présentation suivante a été donnée par Pierre Pericard de la Station Biologique de Roscoff qui nous a présenté un environnement pour les analyses métabolomiques sous Galaxy. Nous avons eu ensuite une présentation de R. Bourqui qui nous a présenté l'outil Systrip qui permet la visualisation de données temporelles des réseaux métaboliques. La session s'est terminée sur la présentation par Yvan Le Bras d'un Environnement Virtuel de Recherche (EVR) pour la Biologie mis en place pour l'ouest de la France. Cet EVR est basé sur l'utilisation d'outils et de plateformes collaboratifs tels que Galaxy, HUBzero et d'autres…
Nous noterons également que la présentation de Magali Michaut dans la session "Génomique d'association et analyse de variants" fut très agréable à suivre. Celle-ci nous a présenté son travail "Pathway mutation status predicts chemotherapy response in triple negative breast cancer" tout en n'oubliant pas de se mettre au niveau d'un public pouvant parfois ne pas être du milieu.
Cette matinée intense s'est terminée par un délicieux repas servi à table qui a ravi les gourmands avec petit flan au légumes en entrée, confit de canard avec gratin aux champignons et charlotte aux fraises. Après une session posters d'environ une heure et la présentation surprise de RSAT (à découvrir !) par M. Thomas-Chollier, nous avons enchaîné avec la session plénière sur la biologie de synthèse et la modélisation.
Puis nous avons repris avec une session plénière "Biologie de synthèse et modélisation" avec J‑L Faulon et son "A rational metabolic engineering pipeline : from CAD to product identification". Celui-ci nous a donc expliqué comment il enchaînait différents enzymes pour obtenir certains produits. Pour plus d'informations sur ce domaine il nous a conseillé son livre Handbook of chemoinformatics algorithms. Puis après une courte pause nous avons enchaîné avec le projet de M1 et M2 de Y. Dufresne : "Non ribosomal peptides : a monomeric puzzle". Très fluide et très complète, sa présentation fut très agréable à suivre. Enfin, nous avons cloturé cette longue journée avec T. Gaillard qui nous présenta son "Computational protein design in the genomic era".
Jour 3
Nous avons commencé cette journée très tôt avec une présentation très intéressante de Christine Brun (qui n'a pas manqué de remercier l'organisation de lui avoir attribué la présentation la plus matinale de la conférence) sur les réseaux d'interaction protéine-protéine (PPI) et ce que l'on arrive à prédire grâce à eux. Nous avons ensuite assisté à la présentation de Juan Cortès sur MoMA-LigPath, un outil permettant de simuler la sortie d'un ligand de son site actif. Le tout est modélisé à partir d'algorithmes utilisés en mécanique, pour calculer notamment les trajectoires des robots soudeurs sur les lignes d'assemblage. La présentation était accompagnée de jolies animations modélisées. Vous pourrez jouer avec son outil ici.
Après une présentation du GdR-BIM, c'est Jean-François Gibrat qui enchaina avec l'IFB. Et là, pour ne pas mentir, nous sommes un peu tombés des nues… Ce projet prometteur qu'il nous avait présenté l'année dernière à Rennes n'a semble-t-il pas avancé… La faute à la lenteur administrative, aux demandes répétées de signatures en mille exemplaire pour un même papier, bref de quoi décourager le plus motivé des hommes. Nous avons d'ailleurs bien senti l'agacement de Jean-François quant à cette situation et partageons clairement son "énervement". Il semble honteux qu'un projet aussi bénéfique pour la Recherche française ait autant de bâtons dans les roues bien avant sa création. Un SIB à la sauce française pourrait en effet débloquer énormément de choses (comme permettre à la France d'être représentée dans le projet Elixir par exemple) et faire avancer clairement la Recherche dans l'hexagone. Pour cela entre autre, nous soutenons complétement ce projet et pensons qu'il n'est pas possible que celui-ci n'aboutisse pas. Il est nécessaire, la question ne se pose même pas.
Enfin, après cette petite douche froide dont nous nous serions bien passée nous avons pris une pause avant de nouvelles sessions parallèles :
- NGS et annotation
- Évolution
- Réseaux
La matinée s'est terminée sur un buffet déjeunatoire où nous avons eu du risotto aux gambas, un crumble de légume à la provençale, et une quantité impressionnante de petits fours divers et variés. Nous avons repris par une session poster, l'AG de la SFBI avant de finir la journée par une session autour de la modélisation et des réseaux. Nous avons en particulier assisté à la présentation de Pedro Mendes sur la modélisation du métabolisme, du génome jusqu'aux modèles cinétiques.
Vint enfin la tant attendue soirée de Gala. Elle débuta par un rendez-vous devant le Centre des Congrès, où une troupe de percussions brésiliennes est venue nous chercher, nous accompagnant à travers la ville dans la longue marche qui nous amena à l'Hôtel-Dieu. Danseurs et percussionnistes ont ainsi animé les rues de la ville avec une énergie qui en a surpris plus d’un, suivis de l'immense cortège des 400 participants.
Arrivés à destination, nous fûmes accueillis avec une coupe de vin mousseux et un cortège de petits fours et ateliers dégustation. L'apéritif fut clôturé par une agréable représentation de théâtre-opéra par la troupe Acide Lyrique, dont l'humour décapant n'a d'égal que leurs multiples talents musicaux. Le repas de gala qui suivit était sous le signe de l'écologie, en promouvant l'économie locale et responsable. Le clou du repas fut les chocolats qui accompagnaient le café, agrémentés de criquets et de vers de farine, dont l'élevage local est étudié pour atteindre un impact environnemental minimum. L'expérience inattendue n'a pas déstabilisé les plus courageux qui se sont régalés des chocolats de leurs voisins moins aventureux.
La soirée s'est terminée par un concert donné par un trio : deux guitares, contre-basse. Les musiciens ont mis une sacrée ambiance et la piste de danse a résonné jusqu'à 2h du matin.
Jour 4
La dernière session de ces JOBIM 2013 était autour de l'évolution. Nous avons commencé par une présentation de Laurent Duret sur l'évolution du génome humain. Nous avons ensuite écouté Cécile Pereira qui compare des profils phylogénétiques de champignons afin de caractériser leur profil enzymatique en vue de faciliter l’assignation taxonomique de nouveaux individus. Nous noterons, pour l'anecdote, que Cécile a réussi à placer le mot "banane" dans sa présentation.
Après une dernière pause café et une dernière présentation sur la phylogénie des virus par F. Chevenet, nous avons assisté à la remise des récompenses JOBIM 2013.
Les gagnants du prix du poster JOBIM2013 sont : Guillaume Collet (notre bilouweb) et Guillaume Rizk grâce à leur merveilleux petit Minia (voir photo).
Pour nous, cette victoire vient s'ajouter à celle du meilleur poster JOBIM2012 décroché par Nicolas (Nico M.) et du meilleur poster ECCB12 accordé à Adem Bilican (ademcan). Notre proverbe tient donc toujours la route :
Là où bioinfo-fr passe, les posters trépassent !
Et enfin, les co-lauréates du prix de la meilleure présentation de ces JOBIM2013 sont Virginie Calderon ("Evolutionnary dynamics of Escherichia/Shigella fimbriome") et Elke Schaper ("Complete conservation of human protein tandem repeats across the eukaryotic clade"). Félicitations à elles !
Les Journées Ouvertes en Biologie, Informatique et Mathématiques 2013 se sont donc dans l'ensemble bien déroulées et ont été suivies par le workshop JeBiF le jeudi après-midi et le vendredi matin qui ont eux aussi rencontré un franc succès.
Voici des petits graphiques afin de recenser l'activité propre à la conférence sur Twitter pour ceux que ça intéresseraient. Merci à max pour le script qui génère ces résultats. Les sources de celui-ci sont disponibles sur Github.
Il ne nous reste alors plus qu'à vous souhaiter un bon été et à vous donner rendez-vous en 2014 pour les prochaines JOBIM, qui n'en seront en fait pas puisqu'ils fusionneront avec l'ECCB14 à Strasbourg. À ne pas manquer !
Les auteurs ayant participé à la rédaction de cet article sont : bilouweb, Bunny, NiGoPoL, Nisaea, Serahline et Yoann M. .
Ils tiennent à remercier max et ZaZo0o pour leur relecture sans faille.
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